Jeux Mathématiques et Logiques
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Gilles HAINRY, agrégé de mathématiques,email : gilles.hainry_at_univ-lemans.fr
Calendrier liturgique
©
Gilles HAINRY, Université du Maine
Le temps du Carême
&
le temps de Pâques
Ó
Gilles HAINRY,
Prologue
Marin Buard, né le 20 ventose de l'an VIII à Sainte Gemme le Robert (Mayenne), de René Buard (tisserand) et de Marie Feurprier était un solide gaillard, mais un jeune homme un peu timide ; c'est à la foire de la Mi-Carème d'Evron, en 1823, qu'il vit vraiment pour la première fois Jeanne Pilon ; fille de Louis Pilon et de Marie Lesourd, Jeanne était née à Vimarcé le 9 fructidor de l'an III ; Marin avait donc un peu moins de cinq ans de moins que Jeanne, n'empêche... Marin et Jeanne se rencontrèrent par hasard à l'assemblée de Châtres la Forêt, le dimanche de la Quasimodo ; ils se retrouvèrent à celle d'Assé le Béranger le jeudi de l'Ascension ; ils s'embrassèrent à celle de Voutré à la Trinité ; et ils conclurent qu'ils étaient faits l'un pour l'autre à la fête de Vimarcé, le " grand dimanche ", le dimanche le plus proche du 15 juillet : Marin ne participa même pas aux rixes qui eurent lieu, comme presque chaque année entre les jeunes gens ! ... Le 27 février 1824, à Saint Georges sur Erve, Marin, exerçant comme son père la profession de tisserand, épousait Jeanne.
I. Calendrier perpétuel
Nous nous bornerons ici à rappeler que l'année pouvant commencer par un lundi, un mardi, un mercredi, un jeudi, un vendredi, un samedi ou un dimanche, et être ou ne pas être bissextile, il y a par conséquent sept fois deux, soit quatorze calendriers possibles.
Ces quatorze calendriers sont proposés dans les tableaux A, AG, B, BA, C, CB, D, DC, ..., F, FE, G et GF que l'on obtient à partir du choix du tableau 2 ; pour savoir lequel utiliser, il suffit d'aller chercher sa référence (lettre(s) dominicale(s)) dans le tableau 3 Le calendrier particulier de 1582 est représenté dans le tableau GC ; ceci fait que nous avons en fait non pas quatorze, mais quinze calendriers possibles si l'on compte celui de 1582, année du passage (en France) du calendrier julien au calendrier grégorien.
utilisation
Le tableau 3 nous indique que la lettre dominicale pour 1823 est E (on trouve ce renseignement à l'intersection de la ligne 182. et de la colonne ...3) ; le tableau E, calendrier de 1823 nous indique que le dimanche le plus proche du 15 juillet est le 13 juillet ; c'est la date du " grand dimanche " de Vimarcé pour cette année 1823.
1824 est une année bissextile ; le tableau 3 nous indique ses lettres dominicales : DC (à l'intersection de la ligne 182. et de la colonne ...4); reportons nous donc au tableau DC, qui est le calendrier de l'année 1824 ; Marin et Jeanne se sont mariés le 27 février, un vendredi.
Nous pensons que ces deux exemples suffisent à montrer comment utiliser les tableaux A à GF obtenus à partir de tableau 2 .
remarque
Le tableau 1 rappelle " une formule simple, facile à mettre en mémoire humaine " ; cette formule, très ancienne, est plutôt destinée aux nostalgiques du calcul mental qui voudraient parvenir aux calculs de dates sans recourir à la consultation de documents ; nous l'avons résumée sous une des formes les plus courantes.
II. Calendrier liturgique
Les jours de la semaine ne sont pas seuls pour rythmer notre vie et notre histoire : les fêtes ont une grande importance également dans nos calendriers, et notamment les fêtes mobiles liées à Pâques.
fêtes mobiles
Commençons par dresser une liste (non exhaustive) de jours dont la date est fixée en référence à Pâques.
Quelques dimanches :
Septuagésime = neuvième dimanche avant Pâques
Sexagésime = huitième dimanche avant Pâques
Quinquagésime = septième dimanche avant Pâques = dimanche précédant le Carème
Quadragésime = sixième dimanche avant Pâques = premier dimanche de Carème
Reminiscere = cinquième dimanche avant Pâques = deuxième dimanche de Carème
Oculi = quatrième dimanche avant Pâques = troisième dimanche de Carème
Laetare = troisième dimanche avant Pâques = quatrième dimanche de Carème
Passion = deuxième dimanche avant Pâques = cinquième dimanche de Carème
Rameaux = premier dimanche avant Pâques = sixième dimanche de Carème
Pâques = Pâques = fin du Carème
Quasimodo = premier dimanche après Pâques
Pentecôte = septième dimanche après Pâques
Trinité = huitième dimanche après Pâques
D'autres dates :
Mardi-Gras = mardi qui suit le Quinquagésime
Cendres = mercredi qui suit le Quinquagésime = premier jour du Carème
Mi-Carème = jeudi précédant Laetare = vingtième jour de jeûne (au Moyen-Age, c'était le quatrième dimanche de Carème, i.e. Laetare)
Vendredi Saint = avant veille de Pâques
Rogations = les trois jours qui précèdent l'Ascension
Ascension = jeudi qui précède de 10 jours la Pentecôte
Fête Dieu = jeudi qui suit la Trinité (aujourd'hui le dimanche suivant, soit le neuvième dimanche après Pâques)
On obtient ainsi, en faisant suivre chaque jour de son écart à Pâques la liste suivante :
Septuagésime : - 63 ; Sexagésime : - 56 ; Quinquagésime : - 49 ; Mardi-Gras : - 47 ; Cendres : - 46 ; Quadragésime : - 42 ; Reminiscere : - 35 ; Oculi : - 28 ; Mi-Carème : - 24 ; Laetare : - 21 ; Passion : - 14 ; Rameaux : - 7 ; Vendredi Saint : - 2 ; Pâques ; Quasimodo : + 7 ; Ascension : + 39 ; Pentecôte : + 49 ; Trinité : + 56 ; Fête Dieu : + 60.
Les fêtes les plus usitées sont comprises dans une période de cent jours qui va du dimanche de quinquagésime au lundi de Pentecôte. Le dimanche de Pâques est exactement le cinquantième jour de cette période ; les jours qui le précèdent constituent approximativement ce que l'on appelle le temps du Carème ; les cinquante jours suivants formant le temps de Pâques.
En fait, le Carème est une période de quarante jours dans laquelle les dimanches (le jeûne est interdit le dimanche) ne sont pas comptés, qui s'achève à Pâques ; comme il y a six dimanches dans cette période, le Carème commence quarante-six jours avant Pâques : le mercredi des Cendres, lendemain du Mardi-Gras.
La Mi-Carème, un jeudi, est le vingtième jour du Carème (qui en compte quarante), toujours en exceptant les dimanches ; c'est le jeudi de la troisième semaine pleine de Carème, mais c'est en réalité le quatrième jeudi du Carème.
Pour aider au calcul des dates, nous avons décidé de fixer des repères chronologiques à l'intérieur de cette période de cent jours ; notre choix s'est porté sur Mardi-Gras, la Mi-Carème, Pâques, l'Ascension et la Pentecôte.
En utilisant des abréviations que chacun comprendra pour les dates des divers événements, comme par exemple mica pour la date de la Mi-Carème, on a quelques petites formules qui permettent de se référer facilement aux repères choisis :
quin = magr - 2 ; cend = magr + 1 ; quad = magr + 5 ; remi = magr + 12
remi = mica - 11 ; oculi = mica - 4 ; laet = mica + 3 ; pass = mica + 10
pass = paqu - 14 ; rame = paqu - 7 ; vens = paqu - 2 ; quas = paqu + 7
trin = pent + 7 ; fedi = pent + 11
les tableaux
La date de Pâques peut varier du 22 mars au 25 avril inclus, soit trente-cinq possibilités ; l'année pouvant être ordinaire ou bissextile, on a donc deux fois trente-cinq soit soixante-dix types différents de calendriers incluant les fêtes liturgiques.
Il va de soi que la date de Pâques induit la (ou les) lettre(s) dominicale(s) ; ainsi chacun des quatorze calendriers présentés dans les tableaux A à GF (GC non compris) correspond théoriquement à cinq dates possibles de Pâques, et, bien sûr, quatorze fois cinq donne de nouveau soixante-dix..
Nous avons recensé dans toutes les possibilités depuis 1710 jusqu'à 2089 soit trois cent quatre-vingts années différentes, correspondant à soixante-quatre types de calendriers ; six types ne sont pas représentés : nous n'avons trouvé aucune année bissextile avec Pâques le 22 mars, le 25 mars, le 30 mars, le 15 avril, le 24 avril ou le 25 avril.
Certains types sont plus représentés que d'autres ; s'il peut sembler naturel que les extrèmes soient plus rares, on peut s'étonner que le Hasard ait choisi de fixer Pâques dix-sept fois sur trois cent-quatre-vingts le 5 avril, jour où l'on fête les pacifiques Irène ; faut-il voir dans cette façon d'honorer le 5 avril plus souvent qu'à son tour, puisque trois cent-quatre-vingts divisé par trente-cinq donne environ onze, un clin d'oeil de Pâques à la Paix, ou Pax sa presqu'homonyme ?
Le tableau 5 indique chronologiquement, année après année, de 1801 à 2000, les dates de Mardi-Gras, la Mi-Carême, Pâques, l'Ascension et la Pentecôte ainsi que la (ou les) lettre(s) dominicale(s). Ce sont des tableaux à lecture directe qui peuvent répondre aux interrogations les plus fréquentes.
Le tableau 6 enfin indique quant à lui les dates de Pâques, Ascension et Pentecôte de chaque année comprise entre 1900 et 2089, d'une manière légèrement différente. (jour après jour)
utilisation
Le tableau 5 nous indique qu'en 1823, Mardi-Gras était le 11 février ; la Mi-Carème le 6 mars ; Pâques le 30 mars ; l'Ascension le 8 mai ; et la Pentecôte le 18 mai.
La formule trin = pent + 7 nous donne la date de l'assemblée de Voutré : le 25 mai, jour de la Trinité.
Quant à l'assemblée de Châtres la Forêt, le dimanche de la Quasimodo, on trouve que c'était le 6 avril grâce à la formule quas = paqu + 7, ou en observant dans le tableau E le premier dimanche après le 30 mars.
foires et assemblées
Il suffit de consulter l'almanach du facteur (celui de 1997 par exemple) ou le dictionnaire de la Mayenne de l'abbé Angot pour vérifier qu'il n'y a pas que dans le canton d'Evron que certaines foires et assemblées sont fixées par référence au calendrier liturgique ; nous donnons ci-dessous quelques exemples pris au hasard de la géographie, dans le département de la Mayenne :
A Ambrières, une foire a lieu le samedi avant la Mi-Carème ; à Chateau-Gontier se déroule une foire aux bovins le jeudi de la Mi-Carème ; à Larchamp, c'est le lundi de la Pentecôte pour les bovins et porcins ; Lassay les Chateaux organise sa première foire de l'année le lendemain de Mardi-Gras ; Mayenne fait la foire le jeudi qui précède la Passion ; Villaines la Juhel quant à elle annonce une foire le premier lundi de Carème et une autre le lendemain des Rameaux...
Selon l'abbé Angot, l'assemblée de Saint Germain de Coulamer a lieu le dimanche qui suit l'Ascension ; il y en a une au Buret le lundi de Pâques ; une à la Baconnière à la Trinité ; interrompue en 1840, celle de la Poôté a été rétablie en 1864, à la Pentecôte...
Le lecteur aura sans doute quelques exemples personnels à rajouter, et pourra s'il le souhaite, grâce aux tableaux qui constituent le corps de cet article, dater précisément tel ou tel événement de telle ou telle année.
Epilogue
Le 25 mai 1997, dimanche de la Trinité, quelques-uns des arrière petits-enfants d'un des arrière petit-fils de Marin Buard et de Jeanne Pilon discutent à l'occasion de l'assemblée de Voutré ; leur sujet de conversation du moment est le calendrier de l'année en cours ; ils ignorent naturellement que c'est le même qu'en 1823, où l'assemblée de Voutré eut lieu aussi le 25 mai ; mais, est ce vraiment tout à fait le même calendrier ? Sans doute pas : en effet, la préoccupation de ces jeunes gens du vingtième siècle est de savoir si le 11 novembre tombera un jour sur semaine ou un dimanche ; on a déjà perdu un jour férié à l'Ascension puisque c'était le 8 mai !
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Ouvrages consultés
Le Petit Larousse illustré (édition 1995)
Quid (édition 1986)
Dictionnaire de la Mayenne (Abbé Angot 1902 ; réédition Joseph Floch 1982)
Arbre généalogique de l'auteur
Bibliographie
Astronomie populaire : livre xxxiii consacré au calendrier (F. Arago ; 2°édition Paris 1860)
Manuel de diplomatique (A. Giry ; Burt Franklin 1893)
Les calendriers in La Mayenne Archéologie Histoire n°19 (G. Hainry ; S.A.H.M. 1996)
Calendriers et chronologie (J.P. Parisot et F. Suagher ; Masson1996)
Le temps du Carême et le temps de Pâques in La Mayenne Archéologie Histoire n°20 (G. Hainry ; S.A.H.M. 1997)
18 mai 1998