Jeux Mathématiques et Logiques

 

service maintenu par Gilles HAINRY, agrégé de mathématiques,
Université du Maine
I.U.T. Techniques de Commercialisation
53000 LAVAL
(France)

email : gilles.hainry_at_univ-lemans.fr

 

ORTHODROMIE et LOXODROMIE

 

© Gilles HAINRY, Université du Maine

 

 

 

La ligne droite est le plus court chemin d'un point à un autre ;
Qui n'a jamais entendu et fait sienne la maxime ci-dessus ? Et pourtant ...



La Terre

On appelle circonférence de la sphère la longueur de n'importe lequel des plus grands cercles que l'on peut tracer sur sa surface ; en d'autres termes, la circonférence de la sphère est celle du plus petit cercle au travers duquel on peut la faire passer ; on peut aisément se représenter cette image en pensant au panier dans lequel passe un ballon de basket-ball : ce panier est constitué d'un cercle dont la circonférence minimale est celle du ballon.

La Terre, notre planète, a la forme d'un ellipsoïde de révolution aplati, mais nous supposerons que c'est une sphère de 40 000 km de circonférence. Le rayon de la terre est donc de 40 000 / (2.pi) soit environ 6 366 km ; c'est la distance du centre O de la Terre à n'importe quel point de sa surface.

L'un des grands cercle joue un rôle particulier ; on l'appelle équateur ; il partage la Terre en deux : l'hémisphère Nord et l'hémisphère Sud.

Tout cercle tracé sur la sphère et qui se trouve dans un plan parallèle à celui qui contient l'équateur s'appelle un parallèle.

Deux des parallèles (un dans l'hémisphère Nord et un dans l'hémisphère Sud) sont réduits à un point (leur rayon est nul) ; on les appelle pôles ; il y a donc un pôle Nord et un pôle Sud.

La droite qui passe par les pôles est la perpendiculaire au plan équatorial qui passe par le centre de la Terre ; on l'appelle axe des pôles

Les demi-cercles tracés sur la sphère qui ont pour extémités les deux pôles sont des méridiens ; ce sont des moitiés de grands cercles. L'un d'eux, celui qui passe par Greenwich (près de Londres, en Angleterre), sert d'origine : c'est le méridien zéro ; il coupe l'équateur en un point G.

Latitude et longitude

Tout point M de la Terre se trouve sur un méridien qui coupe l'équateur en un point E ; le plus petit des deux angles (GOE) est appelé longitude du point M ; si E est à l'Ouest de G, on parle de longitude Ouest et celle-ci est comptée positivement ; dans le cas contraire, il s'agit de longitude Est, et elle est comptée négativement.

L'angle (EOM) est appelé latitude du point M ; si M est dans l'hémisphère Nord, elle est comptée positivement et il s'agit d'une latitude Nord ; sinon, c'est une latitude Sud, qui sera comptée négativement.

Il revient par exemple au même de dire que le port des Sables d'Olonne se trouve à 46°45'N et 1°45'O ou bien que sa latitude est 46,75 et sa longitude 1,75 (on a converti les degrés/minutes en degrés décimaux).

Le port de Fremantle en Australie, se trouve, lui, à environ 32°S et 115°E, c'est à dire que sa latitude est approximativement -32 et sa longitude -115.

La coutume veut que les mesures soient effectuées en degrés et minutes, et un arc de méridien joignant deux points dont les latitudes diffèrent d'une minute s'appelle un mille marin ou plus simplement un mille.

Les latitudes varient de -90° au pôle Sud à +90° au pôle Nord en passant par 0° en tout point de l'équateur.
Les longitudes sont comprises entre -180° et +180°, ces deux extrèmes représentant le même méridien (celui qui forme avec le méridien Zéro un grand cercle).

Le mille marin

C'est, rappelons le de manière différente, la longueur d'un arc de une minute sur un méridien (en assimilant arc et angle au centre).

Puisque la longueur d'un méridien est de 20 000 km (un demi grand cercle), et qu'un méridien représente un arc de 180°, on voit, puisqu'il y a 60 minutes dans un degré que :
20 000 km = 180 * 60 milles
on a donc :
1 mille = 20 000 / 10 800 km
soit environ 1,852 km.
La vitesse d'un bateau ou d'un avion est généralement exprimée en noeuds, le noeud équivalant à un mille marin par heure.

Ainsi par exemple, un bateau qui file 14 noeuds parcourt 14 milles marins à l'heure ; sa vitesse exprimée différemment serait de 26 km/h environ (14*1,852).

Notons que le mille marin est parfois appelé nautique ; il ne faudra surtout pas le confondre avec le mile anglais qui est beaucoup plus court.

Coordonnées sphériques

Afin de repérer de manière cartésienne les points de la Terre, imaginons l'espace muni d'un repère d'origine O, d'axe des abscisses la droite (OG), d'axe des ordonnées la droite (OH), d'axe des cotes la droite (ON), où O est le centre de la Terre, G le point du méridien zéro qui se trouve sur l'équateur, H le point de l'équateur de longitude 90°O et N le pôle Nord ; ces axes sont orientés de telle sorte que :

G a pour coordonnées (R ; 0 ; 0) ;
H a pour coordonnées (0 ; R ; 0) ;
N a pour coordonnées (0 ; 0 ; R) ;

où R représente la mesure du rayon de la Terre (qui dépend bien sûr de l'unité choisie).

Pour obtenir les coordonnées d'un point M de la surface de la Terre, connaissant ses latitude, notée lat(M), et longitude, notée long(M),

on projette le point M sur le plan (GOH) parallèlement à (ON) ; il s'agit en fait d'une projection orthogonale ; on obtient un point L tel que OL = R . cos [ lat(M) ] .
on projette le point M sur l'axe (ON) pa rallèlement au plan (GOH), c'est à dire à (OL) ; on obtient un point K de coordonnées ( 0 ; 0 ; R . sin [ lat(M) ] ) .
on projette le point L sur l'axe (OG) orthogonalement, obtenant ainsi un point I de coordonnées ( R . cos [ lat(M) ] . cos [ long(M) ] ; 0 ; 0) .
on projette le point L sur l'axe (OH) orthogonalement, obtenant ainsi un point J de coordonnées ( 0 ; R . cos [ lat(M) ] . sin [ long(M) ] ; 0) .

L'abscisse de I, l'ordonnée de J et la cote de K sont respectivement l'abscisse, l'ordonnée et la cote du point M, de telle sorte que l'on a :

				| R . cos [ lat(M) ] . cos [ long(M) ] 
			      M	| R . cos [ lat(M) ] . sin [ long(M) ] 
				| R . sin [ lat(M) ]


Rappelons que le théorème de Pythagore permet d'écrire

		OM˛  =  OL˛ + OK˛    
	et
		OL˛  =  OI˛ + OJ˛ 
	et donc 
		OM˛  =  OI˛ + OJ˛ + OK˛ 
	soit 
OM˛ 	=  (R . cos [ lat(M) ] . cos [ long(M) ] )˛ + (R . cos [ lat(M) ] . sin [ long(M) ] )˛ + (R . sin [ lat(M) ])˛ 
	=  (R . cos [ lat(M) ] )˛ . [ (cos [ long(M) ] )˛ + ( sin [ long(M) ] )˛ ] + (R . sin [ lat(M) ])˛
	=  (R . cos [ lat(M) ] )˛ + (R . sin [ lat(M) ])˛
	=  R˛ .  [ (cos [ lat(M) ] )˛ + (sin [ lat(M) ])˛ ]
	=  R˛ 


ce qui est naturel puisque OM est un rayon de la Terre.

N.B. : on a utilisé dans cette démonstration la formule cos˛(a) + sin˛(a) = 1 vraie pour tout réel a.

Distance entre deux points

Soient A et B deux points de la surface de la Terre, leur distance AB est par définition la mesure du segment [AB] ; cette mesure ne dépend que de la différence de longitude entre Aet B ( que l'on peut choisir comprise entre 0 et 180° ) et de leurs latitudes respectives ; on considèrera donc afin de simplifier l'écriture que A est de longitude nulle, et l'on posera long = long(B)

On a donc :

				| R . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]
			      B	| R . cos [ lat(B) ] . sin [ long ]
				| R . sin [ lat(B) ]

et
				| R . cos [ lat(A) ]
			     A	| 0
				| R . sin [ lat(A) ]

D'où 	AB˛   =  ( R . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  -  R . cos [ lat(A) ] ) ˛  +   ( R . cos [ lat(B) ] . sin [ long ]  ) ˛
		 + (R . sin [ lat(B) ]  - R . sin [ lat(A) ] ) ˛
	         =   2  .  R˛  .  ( 1  -  cos [ lat(A) ]  . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  - sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  )
soit :

AB  =  R  .  [  2 .  ( 1  -  cos [ lat(A) ]  . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  - sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  )  ] ^ (1/2)


On doit cependant avoir à l'esprit que cette distance de A à B, plus court chemin entre les deux points au sens euclidien du terme, nécessiterait la percée d'un tunnel reliant A à B, ce qui n'est pas très rationnel !

Distance orthodromique de deux points

Soient A et B deux points de la surface de la Terre ; la route la plus courte pour aller du point A au point B est l'arc de grand cercle sous-tendu par la corde [AB]. La longueur de cet arc, exprimée en milles, est la mesure en minutes de l'angle (AOB) ; on l'appelle distance orthodromique de A à B, et on la note ortho (A,B).

L'angle (AOB) est le double d'un angle dont le sinus est le quotient de AB/2 par R ; en effet, si l'on note T le milieu de [AB], le sinus de l'angle (AOT) est le rapport du côté opposé et de l'hypoténuse dans le triangle rectangle AOT, soit AT/OA où OA = R et AT = AB/2.

On a donc :


mes(A,B) =  2 arcsin ( [ ( 1 -  cos [ lat(A) ] . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  - sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  ) / 2 ]^ (1/2) )


et, si l'on a choisi de " travailler " en degrés, en multipliant par 60, on obtient :


ortho (A,B) =  120 arcsin ( [ ( 1 -  cos [ lat(A) ] . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  - sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  ) / 2 ] ^(1/2) )


Cette formule étant un peu lourde, du fait de la racine carrée, on va la transformer en utilisant quelques artifices trigonométriques.

On rappelle que cos ( 2 . u ) = 1 - 2 sin˛ ( u )

On a donc cos ( 2 . arcsin ( k ) ) = 1 - 2 . sin˛ ( arcsin ( k ) )
= 1 - 2 . k˛

D'où 2 . arcsin ( k ) = arccos ( 1 - 2 . k˛ )

On en déduit que la distance orthodromique de A à B s'écrit sous la forme simplifiée :

ortho (A,B) =  60 arccos (  cos [ lat(A) ] . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  +  sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  )  


C'est d'ailleurs sous cette forme qu'on la trouve dans la plupart des ouvrages de navigation.

Notons que le calcul est, de nos jours, grandement facilité par l'usage d'une petite calculatrice scientifique dotée des fonctions trigonométriques et des fonctions trigonométriques inverses ; la fonction arccos (respectivement arcsin ou arctan) s'obtient le plus souvent en combinant les touches INV et COS (respectivement INV et SIN ou INV et TAN). Nous nous permettons d'insister sur la nécessité d'utiliser la machine en " mode degré " et de veiller à la conversion des degrés et minutes en degrés décimaux.

Distance orthodromique de Dunedin à Iquique

Le port de Dunedin en Nouvelle Zélande se trouve à environ 45° de latitude Sud et 170° de longitude Est.
Le port d' Iquique au nord du Chili se situe environ à 20° de latitude Sud et 70° de longitude Ouest.
On a ainsi lat ( Dunedin ) = - 45 et long ( Dunedin ) = - 170
de même, lat ( Iquique ) = - 20 et long ( Iquique ) = 70

La différence de longitude 70 - (-170 ) = 240 sera remplacée par 120 ( 360°- 240° = 120° ) car il n'y a pas de raison de tourner autour de la Terre en suivant le plus grand des deux arcs de grand cercle passant par les deux ports.

On est ainsi amené à considérer deux points A et B tels que

		lat ( A )  =  - 45   et  long ( A )  =  0
		lat ( B )  =  - 20   et  long ( B )  =  120  =  long

On a alors
		ortho (A,B)  =   60 arccos (  cos [ - 45 ] . cos [ - 20 ] . cos [ 120 ]  +  sin [ - 45 ] . sin [ - 20 ]  )
			      =   60  arccos ( - 0.0904 )
			      =   60 .  95,19
			      =   5 711 milles


La distance orthodromique de Dunedin à Iquique est donc de 5 711 milles ou encore 10 463 km ; notons que c'est la mesure de la route la plus courte entre les deux ports, mais qu'un tunnel en ligne droite les mettrait à 9 400 km l'un de l'autre : En effet 5 711 milles représentent un angle au centre de 5 711 minutes, soit 95,18° et
AB = 2. R . sin ( 95,18 / 2 ) = 2 R sin ( 47,59 ) = 1,4767 . R avec R = 6 366 km, d'où AB = 9 400 km.

La projection de Mercator

Une manière commode de représenter la surface du globe sur une surface plane consiste à utiliser la projection dite de Mercator :

Sur un cylindre tangent à la Terre le long de l'équateur, et qui a donc pour axe l'axe des pôles, on projette chaque point de la surface de la Terre perpendiculairement à cet axe ; de façon plus précise, disons que l'on choisit comme image d'un point M de la Terre le plus proche de M des deux points d'intersection de la perpendiculaire à l'axe passant par M et du cylindre. Les deux pôles posent évidemment problème et ont chacun pour image un cercle entier du cylindre parallèle à l'équateur, distant de R de celui-ci.

En coupant le cylindre par une perpendiculaire à l'équateur, puis en le déroulant, la Terre se trouve représentée par un grand rectangle qu'on appelle une carte géographique.

Un avantage évident de cette représentation est que les parallèles sont des droites parallèles à l'équateur et aux grands côtés du rectangle, tandis que les méridiens sont des droites perpendiculaires à l'équateur, parallèles aux petits côtés du rectangle.

Un inconvénient majeur de cette représentation est que les distances ne sont pas respectées et que la route orthodromique, c'est à dire la plus courte n'est jamais une droite, sauf pour deux points situés sur un même méridien.



Le diagramme ci dessous montre la route orthodromique de Dunedin à Iquique sur une carte de Mercator.


Les onze points permettent de se faire une idée de la route ; la distance entre deux points consécutifs n'est pas constante, mais, le sixième point ( latitude : -51,06° ; différence de longitude : 73,75° avec Dunedin, 46,25° avec Iquique ) est au milieu de la route

Certains seront sans doute surpris que cette route parte d'abord vers le sud-est (la latitude décroît, la longitude croît), puis s'infléchisse et se termine en direction du nord-est (latitude et longitude croissent simultanément)...

Distance orthodromique de deux points du cercle polaire

Pour mieux comprendre le phénomène observé dans le précédent paragraphe, il suffit de penser à la route orthodromique entre deux points A et B situés aux deux extrémités d'un diamètre du cercle polaire arctique (66,567° de latitude Nord pour les deux points et 180° de différence de longitude) ; cette route passe par le pôle Nord, c'est à dire qu'elle commence plein nord et se termine plein sud ; en effet, le grand cercle passant par ces deux points passe aussi par les deux pôles.

Plus précisément, la mesure de la route orthodromique entre ces deux points est de 60 * ( 180 - 2 * 66,567 ) milles, soit 2812 milles ; en effet, il suffit de mesurer en minutes l'angle au centre correspondant, c'est à dire de déduire d'un angle plat (180°) deux fois la latitude de A ou B.
On retrouve d'ailleurs ce résultat avec la formule établie plus haut :

ortho (A,B) =  60 arccos (  cos [ lat(A) ] . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  +  sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  )
		avec 	          cos [ long ] =  cos (180)  =  - 1    et    lat(A) = lat(B) 
		d'où    		ortho (A,B)  =   60 arccos (  - cos˛[ lat(A) ] +  sin˛[ lat(A) ] )
					      =   60 arccos (  - cos [ 2 lat(A) ]  )
					      =   60 arccos ( cos [ 180 -  2 lat(A) ]  ) 
					      =   60  *  [ 180  -  2 lat(A) ] 
					      =   60  *  [ 180  -  2 * 66,567 ] 
									comme souhaité.


En revanche, si l'on allait d'un point à l'autre en suivant le cercle polaire, toujours plein est ou toujours plein ouest, on parcourrait une distance de pi fois le rayon de ce cercle, soit pi * cos ( 66,567 ) * R ; comme le rayon de la Terre est R = 180 * 60 / pi (soit 3437 milles), cela ferait 10 800 cos ( 66,567 ) = 4 295 milles.

Notons que la distance euclidienne entre ces points A et B est bien sûr inférieure à la distance orthodromique, puisqu'elle est :

	AB  =  R  .  [  2 .  ( 1  -  cos [ lat(A) ]  . cos [ lat(B) ] . cos [ long ]  - sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  )  ] ^(1/2)
	       =  R  .  [  2 .  ( 1  +  cos˛[ lat(A) ]  -  sin˛[ lat(A) ] )  ] ^(1/2)
	       =  R  .  [  2 .  ( cos˛[ lat(A) ]  +  sin˛[ lat(A) ]  +  cos˛[ lat(A) ]  -  sin˛[ lat(A) ] )  ] ^(1/2)
	       =  R  .  [  4 cos˛[ lat(A) ]^(1/2)
	       =  2 R  cos [ lat(A) ]                      puisque    lat(A)  possède un cosinus positif
	       =   2 734 milles.

mais, cela ne correspond à rien sur la carte, puisque seules les extrémités du segment [AB] sont sur la Terre, ses autres points étant à l'intérieur de la Terre...

Route loxodromique

On a certes du mal à imaginer que la ligne droite tracée sur une carte de Mercator ne représente pas la route optimale pour relier deux points lui appartenant ; nous avons vu plus haut que la route orthodromique de Dunedin à Iquique, qui, rappelons le, est la plus courte, n'est pas le segment joignant les deux ports sur cette carte.

La route qui relie deux points de la Terre en suivant le segment qui les joint sur une carte de Mercator est dite loxodromique ; il faudra se rappeler que, si cette route peut se mesurer, cette mesure n'est pas une distance (au sens mathématique du terme) et que cette route n'est pas le plus court chemin pour relier ces deux points.

Cependant, une route loxodromique est simple à tracer sur une carte (à la règle) et l'on peut très facilement trouver les latitudes et longitudes des points qui se trouvent sur cette route.

Une telle route présente l'avantage de couper chaque méridien selon un angle constant ; cela permet par exemple au navigateur de conserver le même cap durant tout le trajet pour la suivre, ce qui -on l'a vu- n'est pas le cas sur une route orthodromique.

Il y a en fait deux sortes de routes loxodromiques :
- celles qui joignent deux points situés à la même latitude ; elles sont portées par les parallèles et constituent donc sur la Terre des arcs de cercle.
- celles qui joignent deux points A et B de latitudes différentes ; elles constituent des arcs de courbes joignant les pôles puisque les bords supérieur et inférieur d'une carte de Mercator (1) représentent respectivement le pôle Nord et le pôle Sud ; ces courbes sont des demi-cercles (2) dans le cas particulier où les deux points ont même longitude et seulement dans ce cas.
Remarques : (1) il faut ici imaginer plusieurs cartes de Mercator côte à côte, car la " loxodromie " s'enroulera en spirale plusieurs fois autour de la Terre avant de rejoindre les pôles si la pente de la droite (AB) est faible.
(2) dans ce cas, le demi-cercle en question est naturellement un méridien.


Il est encore plus troublant que la route la plus courte ne soit pas celle consistant à suivre le parallèle (du bon côté) lorsque les points ont la même latitude ; nous avons pourtant fait les calculs et apporté la preuve de ce résultat dans le cas de deux points symétriques par rapport à l'axe des pôles et situés sur le cercle polaire arctique...

Des Sables à l'île Sable

Nous pouvons aussi citer un exemple qui nous a été malicieusement donné par notre collègue Edouard Poulain, Maître de Conférences à l'Université du Maine et... marin :

La latitude des Sables d'Olonne, en Vendée, 46,5° N environ, est presque la même que celle du Cap Canso, au nord de l'île Sable, de l'autre côté de l'Atlantique, en Nouvelle Ecosse.
La longitude du Cap Canso est sensiblement égale à 61,75° W ; celle des Sables d'Olonne étant proche de 1,75° W on a donc une différence de longitude de 60°.

La distance orthodromique entre les deux points que l'on notera encore A et B est :

				ortho (A,B)    =  60 arccos (  cos˛[ 46,5 ]  . cos [ 60 ]  +  sin˛[ 46,5 ] )
				        	        =  2 416  milles


La mesure de la route loxodromique de A à B est

				loxo (A,B)     =  60  *  60  *  cos (46,5)
					        =  2 478 milles 


Bien que minime, la différence est tout de même sensible puisque l'on peut observer que la route loxodromique est de 2,5% plus longue que la route orthodromique.

Le 45° parallèle

Le tableau ci-après montre l'évolution des mesures relatives des routes orthodromique et loxodromique reliant deux points du 45ème parallèle (Nord par exemple) en fonction de la différence de longitude entre ces points ; nous avons, à titre indicatif, ajouté la distance euclidienne AB notée ici seg(A,B).

Nous avons choisi d'exprimer dans ce tableau les résultats en kilomètres, ce qui ne change rien aux différences relatives, afin que chacun puisse remarquer que pour une différence de longitude de 180°, la route orthodromique (qui passe par le pôle Nord) est un quart de grand cercle.
On peut voir que la différence relative entre les deux mesures ortho(A,B) et loxo(A,B) croît sur l'intervalle [0°;180°] pour atteindre un maximum de 41,4%, ce qui est loin d'être négligeable.

Route loxodromique simple (points ayant même latitude)

Il est relativement simple de calculer la mesure de la route loxodromique reliant A à B lorsque ces deux points ont la même latitude ; il suffit en effet de mesurer un arc de parallèle.

On a lat(A) = lat(B) ; A et B se trouvent sur un cercle de centre Q (Q est confondu avec O si lat(A) = 0) ; le rayon [QA] de ce cercle est R * cos [ lat(A)] et l'angle (AQB) a pour mesure la différence de longitude entre A et B.

L'arc de cercle (parallèle) joignant A et B a donc pour mesure cos [ lat(A)] fois l'arc d'équateur joignant deux points dont la différence de longitude serait la même.

On en déduit que

loxo (A,B) = 60 . long . cos [ lat(A) ] lorsque lat(A) = lat (B)

Nous avons d'ailleurs déjà utilisé cette formule.

C'est malheureusement plus compliqué lorsque les deux points ont des latitudes différentes, c'est à dire lorsqu'ils ne se trouvent pas situés sur un même parallèle...

Route loxodromique (cas général)

Notons tout de même qu'il existe encore un cas particulièrement simple : celui où les deux point appartiennent au même méridien ; en effet, un méridien étant un demi grand cercle, la route orthodromique se confond dans ce cas avec la route loxodromique et l'on a alors

loxo (A,B)    	= 	ortho (A,B) 
		=  	60 arccos (  cos [ lat(A) ] . cos [ lat(B) ]  +  sin [ lat(A) ] . sin [ lat(B) ]  )
		=  	60 arccos (  cos [ lat(A) - lat(B) ]  )
		=  	60 .  abs  ( [ lat(A) ] - lat(B) ]  )
lorsque   la différence de longitude est nulle, c'est à dire si     long = 0



Résumons :

loxo (A,B)     =    ortho (A,B)    =   60  . abs  ( [ lat(A) ] - lat(B) ]  )     lorsque     long  =  0


où abs ( nombre ) est la valeur absolue de nombre.


Venons en maintenant au cas général :

A et B sont deux points de la surface de la Terre ; on considère afin de simplifier l'écriture que A est de longitude nulle, et l'on posera long = long(B)

On a donc :

				| R . cos [ lat(B) ] . cos [ long ] 
			      B	| R . cos [ lat(B) ] . sin [ long ] 
				| R . sin [ lat(B) ]
et
				| R . cos [ lat(A) ] 
			     A	| 0 
				| R . sin [ lat(A) ]


La route loxodromique de A à B est l'arc qui correspond au segment [AB] tracé sur la carte de Mercator ; c'est donc l'ensemble des points M de latitude
lat(M) = lat(A) + t . [ lat(B) - lat(A) ]
et ayant avec A une différence de longitude
long(M) = t . long pour t variant de 0 à 1.

Pour t = 0 le point M est en A ; pour t = 1 il est confondu avec B.

On obtient ainsi une paramètrisation de l'arc AB sous la forme d'une fonction de t :

				| R . cos [ lat(A)   +   t . [ lat(B) - lat(A) ] ] . cos [ t  . long ] 
			f (t)	| R . cos [ lat(A)   +   t . [ lat(B) - lat(A) ] ] . sin  [ t  . long ] 
				| R . sin  [ lat(A)  +   t . [ lat(B) - lat(A) ]  ]


La mesure de la longueur de l'arc AB est alors donnée, en degrés , par l'intégrale sur l'intervalle [ 0 ; 1 ] de la norme de la dérivée de f ( nous n'insisterons pas sur la démonstration de cette formule et renvoyons les lecteurs intéressés au tome 3 du cours de mathématiques de Lelong-Ferrand et Arnaudiès chez Dunod Université).

Soit


(en degrés)

Il suffit alors de multiplier le résultat par 60 pour exprimer cette mesure en milles. D'où

 

 

 

 

 

 





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Q.I. Calendriers Révolution

octobre 1997 ; mise à jour 8 janvier 2003, puis 8 juillet 2012

Gilles Hainry
Université du Maine
Institut Universitaire de Technologie
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